Malgré ma critique acerbe, le film mérite d’être vu par les geeks et par ceux et celles qui s’intéressent aux questions de l’archivage et des supports médiatiques. Il s’agit toutefois d’un film très moyen, un documentaire pour les nostalgiques, raconté du point de vue des nostalgiques, qui fait essentiellement le portrait de passionnés et de collectionneurs de films sur bandes VHS. Les questions liées à l’industrie sont abordées rapidement, et cela, du point de vue de certains marginaux à l’origine de films à petits budgets, tous aussi mauvais les uns que les autres – sinon culte parce que « so bad it’s good ». Le documentaire de Josh Johnson se contente d’anecdotes, enchaînant les entrevues comme un reportage télé, dont le montage reste ma foi rudimentaire, particulièrement le montage sonore. On s’en rend compte lorsque la même musique joue pratiquement en boucle pendant une dizaine de minutes. Si le réalisateur voulait faire l’usage d’un style brouillon typique de certaines productions des années 80, il aurait fallu mettre un peu plus à l’épreuve le spectateur afin de l’amener à jouer avec lui. Les interventions, pourtant (!), d’Atom Egoyan et même de Mamoru Oshii ne suffisent pas à donner à l’ensemble une cohérence et une crédibilité, hormis l’amour partagé par chacun et les tranches de vie reliées à l’émergence de la cassette VHS et comment celle-ci a facilité, d’une certaine manière, leur travail comme créateur. Tout au long du film, on s’intéresse à l’attrait des covers conçus par des illustrateurs; à l’émergence du V-cinema au Japon et au marché direct-to-DVD; à David « The Rock » Nelson, une sorte d’Ed Wood des temps modernes, qui s’est acharné à produire et tourner des films sur VHS qui n’auraient existé autrement; aux collectionneurs qui témoignent de leurs contacts avec les premiers lecteurs VHS et la découverte, la révélation (!), de pouvoir enregistrer les émissions de télévision favorites; aux propriétaires de clubs vidéo et leurs rapports à l’objet qui se transforment avec la nouvelle donne technologique, etc. Si le film en soi est mauvais, les témoignages, même montés de manière incertaine, sont fort intéressants à écouter pour le nostalgique modéré que je suis, et pour les 35 ans et plus. Le jeune public risque cependant d’avoir de la difficulté à comprendre les passions exprimées à l’égard de ce support. L’intérêt du film est qu’il tente à sa manière de témoigner de l’impact qu’a eu l’émergence de la VHS sur la démocratisation et l’accès aux films, créant ainsi un nouveau type de cinéphile. J’aurais personnellement aimé entendre l’avis de certains universitaires sur la question, comme Barbara Klinger qui consacre un chapitre entier de son ouvrage Beyond the Multiplex (2006) à la question du collectionneur cinéphile, dont le rapport à l’objet, la cassette, ou le DVD, reste primordial. Plusieurs autres questions auraient également été pertinentes à poser de manière plus approfondie, comme la perte annoncée du support au profit de téléchargements sur Internet ou les services de diffusions payantes comme Netflix. Avec la mort des clubs vidéo (récemment à Montréal Le Septième et le Club Vidéo Beaubien), le sujet n’est ici qu’à peine effleuré. Tout de même amusant, les extraits psychotroniques de films qui n’auraient jamais vus le jour sans la VHS valent de bons éclats de rires.