De tous les films asiatiques vus par Kinephanos jusqu’à présent, celui-ci est probablement celui qui suscita le plus de réactions dans la salle, en rires et en applaudissements. Réalisé par Lee Wonsuk, dont c’est le premier long métrage, le film réussit pourtant à nous faire oublier son mauvais titre anglais qui résume tout de même assez bien l’enjeu central du récit. Bona est assistante sur des plateaux de tournage, et aspire secrètement à devenir réalisatrice. Elle est toutefois plutôt réservée et surtout discrète sous les couches de vêtements qui cachent sa féminité. Lors d’une scène qui rappelle un peu Big avec Tom Hanks, elle croise un étrange kiosque ambulant sur la plage où elle s’est endormie par inadvertance, et cela, au beau milieu de la nuit. Elle y rencontre le vendeur, qui a l’air de sortir tout droit d’une infopub, qui lui fait miroiter les vertus de ses cassettes VHS et les astuces de persuasion féminine qu’elles contiennent. C’est alors qu’elle entend changer son rapport entre elle et les hommes qui l’entourent à son travail.
L’idée, par ailleurs, que ce soit des cassettes VHS et non des DVD est intéressante, suggérant ironiquement que ces astuces appartiennent à une autre époque, comme devraient l’être les problèmes d’iniquité homme femme de nos jours pourtant encore bien présents. C’est ici que le film réussit également à surprendre. Certes, les scènes comiques s’enchaînent habilement avec le vendeur, qui apparaît de manière surréaliste pour donner des conseils à Bona de temps en temps, mais on peut également y voir un constat tristement réel sur la perception qu’ont certains hommes des femmes carriéristes, et comment celles-ci doivent déployer plus d’effort que leur contre partie masculine pour atteindre les mêmes résultats. Dans le film, Bona utilise les astuces données par le vendeur pour déployer ses charmes féminins, entre autres : « regarder l’homme dans les yeux, tenir le regard et lui sourire ». Et vlan! Elle fait un usage discret de ses charmes, mais également de son caractère, particulièrement lorsqu’elle doit prendre sa place comme réalisatrice sur le tournage d’une publicité. Une réalité qui, malheureusement, perdure encore aujourd’hui.
Indéniablement, le réalisateur Wonsuk maîtrise bien le sens du rythme, insufflant du même coup une candeur rafraichissante aux personnages que seules les comédies coréennes semblent capables de le faire depuis les dernières années. Certaines situations sont littéralement vaudevillesques et les dialogues, jamais trop sentimentaux, sont juteux et amusants. On pourrait toutefois reprocher au réalisateur d’être tombé dans le piège du convenu dans le dernier tiers du film, tirant les ficelles des codes propres à la comédie romantique, mais pourquoi bouder son plaisir lorsque le tout demeure dans le ton avec efficacité.
On pense ici à My Sassy Girl (2001) de Kwak Jae-yong, qui fut un immense succès en Asie et qui contribua à faire connaître le cinéma populaire coréen en Occident. Mentionnons également du même réalisateur Cyborg She (2008), mais plus récemment, l’an dernier, Sunny (2011) de Kang Hyeong-cheol, qui remporta un vif succès au box-office sud-coréen. Sans verser totalement dans le même registre, Love Fiction (2012) de Jeon Kye-soo, présenté à Fantasia l’année dernière, n’était pas non plus dénué d’intérêt, ainsi que Secretly Greatly présenté cette année au festival, qui connaît aussi un vif succès en Corée du Sud présentement, battant les records d’entrées au box-office, et dont le premier tiers se présente comme dans cette pure tradition comique.
Même s’ils ne sont pas des films coréens, en retrouve également dans How to Use Guys With Secret Tips un peu du charme surréaliste d’Amélie Poulain (2001), surtout avec le regard espiègle et craquant de l’actrice Lee Si-Young qui rappelle celui de Audrey Tautou, et de l’efficacité narrative de Don’t Go Breaking My Heart (2011) de Johnnie To, présenté à Fantasia en 2011. Le cinéma coréen continue d’étonner.