Le festival s’ouvre le 14 juillet prochain avec le film d’animation Miss Hokusai (Keiichi Hara), le dernier des Productions I.G (derrière le magnifique Giovanni’s Island primé l’an dernier au festival et le touchant Letter to Momo). Récipiendaire du prix du jury au Festival international du film d’animation d’Annecy plus tôt cette année, vous ne voudrez certainement pas le manquer à Fantasia. Vous aurez ensuite le choix entre 24 longs-métrages japonais et 11 longs-métrages coréens (Corée du Sud). Lesquels voir? Voici mes suggestions.
Miss Hokusai
L’inégal et prolifique Takashi Miike est peut-être absent du festival cette année, mais qu’à cela ne tienne, son contemporain Sono Sion (imperméable aux compromis forcés par l’industrie – le chef-d’oeuvre de 4 heures Love Exposure en ait un exemple) nous présente non pas un, mais trois films! Love & Peace, une comédie fantaisiste colorée qui flirte allègrement avec le tokusatsu (films à effets spéciaux) et l’excentricité typiquement nippone; Shinjuku Swan adapté d’une série de manga, qui nous permettra de voir le réalisateur à l’oeuvre à partir d’un scénario qu’il n’a pas écrit (fait plutôt rare); puis enfin, Tag, probablement son oeuvre la plus subversive depuis Suicide Club. Oeuvre inclassable qui risque d’incendier la jauge morale du spectateur non averti.
Tag
Parmi les autres habitués du festival, vous pourrez voir le dernier Daigo Matsui, Wonderful World End. Le réalisateur qui nous avait donné les désopilants et singuliers Afro Tanaka et Sweet Poolside les années précédentes nous propose un regard tendre et fait un constat désolant sur le rapport qu’entretiennent certains jeunes avec les médias sociaux. Dans un autre registre que le sensible et primé Uzumasa Limelight présenté l’an dernier au festival, Ken Ochiai nous offre Ninja the Monster. Un film d’action fantaisiste qui pourrait surprendre malgré une prémisse convenue. Mamoru Oshii est aussi de retour. Celui qui a été honoré l’année dernière à Fantasia pour l’ensemble de sa carrière, réalisateur des classiques Ghost in the Shell et Avalon, revient avec un autre film tourné en action réelle Nowhere Girl (en espérant qu’il nous fasse oublier le navrant Assault Girls!). Takeshi Kitano revient également après quelques années d’absence au festival, avec une relecture humoristique du film de yakuza, Ryuso and the Seven Henchmen. Le réalisateur de Sonatine a vieilli, tout comme ses yakuzas du 3e âge qui veulent reprendre du service dans cette comédie qui risque d’amuser le plus stoïque d’entre vous.
Attack on Titan
Deux valeurs sûres adaptées en tournage réel pour les fans de manga et d’anime, Lupin the Third (Ryuhei Kitamura) et Attack on Titan (Shinji Higuchi). L’anime duquel est adapté ce dernier fait un tabac au Japon et chez les fans occidentaux, rappelant le succès remporté par Neon Genesis Evangelion (Hideaki Anno) à la fin des années 90. Il sera par ailleurs le film de clôture du festival. Si vous êtes intéressé, la série anime est actuellement disponible sur Netflix.
100 Yen Love
Les comédies dramatiques 100 Yen Love (Masaharu Take) et La La La at Rock Bottom (Nobuhiro Yamashita) attireront sûrement l’attention des festivaliers à la recherche d’études de personnage réalisées avec finesse et humour (bien que le raffinement de Yuya Ishii [Sawako Decides, Mitsuko Delivers et The Great Passage] risque de me manquer cette année). Côté J-horror, les amateurs du genre ne voudront certainement pas manquer le chapitre final Ju-On: The Final Curse (Masayuki Ochiai) et Fatal Frame (Mari Asato). Si le titre de ce dernier film vous dit quelque chose, vous avez raison. Fatal Frame est aussi une populaire franchise de jeux vidéo adaptée du roman d’Eiji Otsuka. L’adaptation cinématographique de la réalisatrice Asato vous glacera le sang avec ses ambiances glauques et une trame sonore hypnotique qui rappellerait, selon la description du site Fantasia, les classiques de l’horreur occidentale des années 70, comme Suspiria de Dario Argento.
The Case of Hana and Alice
Bien qu’il ait peu d’animations à se mettre sous la dent cette année, la qualité semble au rendez-vous. Les programmateurs de Fantasia ont sûrement compris que les Hunter X Hunter, Blood C et Berserk étaient tous déjà disponibles sur Internet et gratuitement avant leurs projections au festival! L’intérêt d’un festival est d’y présenter des oeuvres qui autrement resteraient inaccessibles… Miss Hokusai (Keiichi Hara) est à voir. Si vous le manquez lors de l’ouverture du festival le 14 juillet, vous pourrez vous reprendre le 25 juillet à 12h. Or, The Case of Hana and Alice (Shunji Iwai) ne sera présenté qu’une seule fois le 19 juillet. Ayant clairement recours à la rotoscopie (voir Snow White [1937] de Disney), le premier film d’animation de Iwai s’annonce pour être un récit touchant sur les relations adolescentes en quête de vérité. Les deux autres films d’animation à ne pas manquer nous viennent de la Corée du Sud, Crimson Whale (Park Hye-mi) et On the White Planet (Hur Bum-wook), deux premières oeuvres singulières de science-fiction qui nous prouvent encore une fois le talent indéniable et le savoir-faire technique des Coréens en matière d’animation.
A Hard Day
Le cinéma coréen est réputé pour son efficacité hollywoodienne et ses récits de vengeance, entre autres. Moins déluré et coloré que son voisin nippon, le cinéma coréen a toutefois l’avantage de traverser beaucoup plus aisément les frontières. Disons qu’il serait plus accessible au néophyte occidental facilement désarçonné par les références culturelles japonaises pas toujours évidentes à décoder (symptomatique d’une culture qui s’isola du monde entier [sakoku] durant plus de 200 ans de 1641 à 1853). Bien reçu à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes en 2014, A Hard Day (Kim Seong-hun) est un thriller rondement mené aux nombreux revirements qui risque fort de plaire au plus difficile des amateurs du genre. Puis il y a Assassination (Choi Dong-hoon), du réalisateur de The Thieves et Woochi présenté à Fantasia en 2010, une superproduction historique où les Japonais héritent encore du rôle d’antagoniste (Histoire oblige!). Du réalisateur Lee Won-suk qui nous avait offert l’hilarant How to Use Guys With Secret Tips présenté à Fantasia en 2013, vous pourrez voir le drame historique The Royal Tailor, à voir pour les amateurs de costumes filmés dans toute leur splendeur. Finalement, encore deux premières oeuvres incisives de réalisateurs à surveiller, le drame Socialphobia (Hong Seok-jae) qui traite de la cyberintimidation, puis Sea Fog (Shim Sung-bo) inspiré de faits réels, racontant les déboires de Kang, un capitaine d’un bateau de pêche contraint d’accepter un contrat lucratif en transportant des immigrants illégaux chinois.
Assassination
Les billets sont en vente à partir de demain le 11 juillet à 13h. Le programme entier est disponible sur le site de Fantasia. Faites vos choix et bon festival!