Du libre arbitre de la semaine dernière, Westworld saute toute de suite à la désobéissance et sa place dans la formation de l’individu. Lorsqu’un individu suit toujours les règles (que ce soit dans un jeu ou en société), il suit un chemin déterminé par d’autres et lorsqu’un choix lui est présenté, il est aussi balisé. Ce n’est qu’en brisant les règles, en désobéissant, en enfreignant les règles d’un environnement que l’on peut réellement se situer, faire des erreurs ou des bons coups et apprendre à se découvrir.
Depuis cinq épisodes, on nous parle de parcours que les gens doivent suivre, d’un modèle qui donne à chaque pièce un objectif, une responsabilité. Que ce soit les hôtes dans le parc ou les ingénieurs, ils sont tous une pièce dans la plus large machine qui doit accomplir son travail pour que tout aille comme prévu. Dolores, Maeve, Lutz (le « boucher »), Elsie ont tous une tâche qui définit leur place dans cet environnement et il est fortement découragé de prendre des décisions qui mènent ailleurs que dans ces parcours.
Les personnages, qu’ils soient humains ou non, se cherchent un but dans la vie, un « destin » qui leur amènera un sentiment de satisfaction personnelle. William découvre cette semaine que lorsqu’on pourchasse notre objectif en suivant les règles, le plafond arrive assez vite, comme Logan lui rappelle avec plaisir. William accomplit par la suite sa première action qui nous permet de constater qui il est/pourrait devenir en désobéissance à Logan qui lui ordonne de l’aider lorsqu’il est pris en otage par les Confederados – un groupe de soldats qui désobéit en continuant une guerre déjà terminée, faute d’avoir un autre objectif dans la vie.
Depuis 4 épisodes, nous assistons à l’éveil progressif des androïdes, plus spécifiquement Maeve et Dolores. Leur évolution est plus accidentelle que volontaire, découvrant les limites de leurs programmations à travers des heureuses coïncidences. Chaque fois qu’elles découvrent une faille dans le système, elles sont soit guidée (dans le cas de Dolores) ou c’est le hasard qui leur accorde un aperçu derrière le rideau (Maeve). Cette semaine, les deux femmes prennent la décision consciente de désobéir à leurs tâches assignées – comme le « boucher » qui enfreint le règlement en essayant de réparer un robot-oiseau. Tandis que Maeve semble parfaitement en contrôle de la situation, assisse nu sur la table d’opération avec un oiseau sur le doigt, Dolores fusille une poignée de vilains dans un acte d’autodétermination féroce. C’est à ce moment qu’elle récite la ligne de la série qui risque de marquer la conscience populaire comme seules les phrases les plus classiques de la fiction le font : « I imagined a story where I didn’t have to be a damsel. » Avec l’attirail de cowboy, le fusil en main et les cadavres autour de l’héroïne, Westworld vient de créer une héroïne qui pourrait éventuellement être reconnue du grand public comme le sont Katniss ou Jon Snow.
Suivant le filon de la désobéissance, l’épisode introduit une nouvelle ville : Pariah, un endroit de débauche où tout est permis. Considérant que Westworld, une fiction de HBO qui propose du vice, contient le parc Westworld, un endroit où l’on nous dit depuis cinq semaines que tout est permis, et que dans ce parc, il y a Pariah, une ville entière où tout est permis, où s’arrêtent les couches de mises en abime? Certainement pas dans le bordel de robots où les gens sont peints en or et les orgies servent de tapisserie. Dans cet endroit où les mœurs sociales sont inversées, le crime et la sexualité sont présentés comme la chose la plus banale que l’on puisse y trouver, puisqu’il n’y a plus rien de choquant dans ces désobéissances.
Il est maintenant temps d’intégrer dans cette lecture le titre et l’histoire de Ford qui ouvre l’épisode. Contrapasso, terme italien retrouvé dans La divine comédie de Dante, désigne la punition que doivent endurer les pêcheurs pour l’éternité. Plus spécifiquement, Contrapasso se rapporte au fait que cette punition n’est ni arbitraire ni gratuite et s’accorde justement avec la façon dont un individu décide de vivre sa vie. Dans la chrétienté, si quelqu’un diverge du droit chemin, celui assigné par Dieu, il devient un pêcheur et souffre selon la gravité de son infraction.
Si on considère Ford comme la figure divine de Westworld (il parle littéralement de créer un monde cette semaine), lorsqu’il parle de chiens de courses, des animaux dont l’objectif clair et précis pour lequel ils sont entrainés toutes leurs vies est de courir en rond, on peut déduire qu’il n’a pas grande estime des humains et hôtes qui l’entourent (comme le mentionne William cette semaine vis-à-vis du créateur du parc). Dieu/Ford a un objectif précis pour chacun des individus, vrais ou fabriqués, qu’il côtoie, des personnages qui cherchent à se défaire de cette boucle sur laquelle Ford les a mis.
L’histoire du chien est « the saddest thing I ever saw » selon Ford, puisqu’après avoir été libérer de sa boucle, le chien s’élance dans un moment de splendeur et de grâce qui ne dure qu’une seconde pour ensuite faire violence à un chat et perdre presque instantanément son objectif d’existence. On peut donc déduire que Ford croit savoir ce qui est mieux pour les autres, qui ne sont que des chiens qui ne sauraient pas quoi faire avec leur liberté une fois qu’ils rompraient leurs liens. Selon la divine justice de Ford, la punition appropriée à des individus qui cherchent à se défaire du chemin divin sur lequel il les a mis, est le vide qu’ils ressentiront après avoir accompli l’objectif qu’ils se sont eux-mêmes fixé.
Il ne reste plus qu’à savoir dans quel camp sont les créateurs de la série. Robert Ford se révélera-t-il être le méchant secret depuis le début dont on cherche à se libérer ou l’Ozymandias (celui de Watchmen) qui manipule les individus pour leurs propres biens? Il faut aussi garder en tête que pour que le chien soit entrainé à courir, il lui faut une carotte au bout d’un bâton, un objectif qu’il ne pourra jamais attraper qui permet à ses maitres de le contrôler secrètement (comme une icône de labyrinthe par exemple?)
Prédictions :
Olivier : Ford ne sera jamais pris au dépourvu par une situation ou une révélation.