Le fond de l’air, de Simon Beaulieu
Simon Beaulieu est un des documentaristes les plus intéressants du cinéma québécois contemporain (il faut notamment avoir vu son film éponyme sur Gérald Godin, de même que Miron, un homme revenu d’en-dehors du monde, superbe collage expérimental sur la vie et l’oeuvre de Gaston Miron). Avec Le fond de l’air, il offre une réflexion onirique sur le devenir du genre humain, à l’heure de la technologie devenue reine et de la catastrophe écologique annoncée. La façon dont la mise en scène fait ressentir l’absurdité du quotidien est particulièrement troublante.
La femme de mon frère, de Monia Chokri
Anne-Élisabeth Bossé crève l’écran dans son rôle de femme-adolescente intello dysfonctionnelle, faisant tenir le personnage à cheval entre l’attachant et l’insupportable. Pour son premier film comme réalisatrice, Monia Chokri fait preuve d’un grand sens de la mise en scène et d’un talent notable pour l’écriture de dialogues. C’est ce qui fait en sorte que La femme de mon frère, qui n’aurait pu être qu’une banale complainte de bobo malheureuse, se révèle un film franchement drôle et mordant.
Fabuleuses, de Mélanie Charbonneau
Les grands sujets peuvent faire les petits films. Il y aurait énormément à dire sur l’impact des réseaux sociaux sur la construction mentale des jeunes femmes, sur l’évolution du milieu médiatique et artistique québécois et sur le renouveau du féminisme, mais à condition de le faire avec profondeur et acuité. On reste assez confus devant des dialogues aussi mal écrits et devant une galerie de personnages qui sont autant de clichés ambulants. En voulant aborder des sujets chauds sur un ton comique, Fabuleuses sombre dans l’insignifiance.
La fin des terres, de Loïc Darses
La fin des terres se donne pour objectif de saisir pourquoi les jeunes québécois ne se sentent plus interpellés par la question nationale. D’entrée de jeu, la voix-off revendique la démarche de Pierre Perrault: partir du réel concret pour comprendre une situation donnée. Excepté que chez Perrault, le concret contenait toujours l’histoire en son sein, et c’est justement l’histoire qui permet de prendre du recul sur une situation. Ici, l’histoire est fréquemment évacuée, diminuée, voire tronquée par les intervenants. Paradoxalement, le film répond donc bel et bien à sa question initiale (pas de rapport à la nation sans attachement à l’histoire et à la continuité), mais il semble le faire sur le dos des personnalités qui ont accepté d’y témoigner.
Sympathie pour le diable, de Guillaume de Fontenay
Un des personnages les plus charismatiques que le cinéma québécois ait offert depuis longtemps! Niels Schneider est d’un naturel désarmant dans le rôle (véridique) de Paul Marchand, journaliste de guerre présent durant le siège de Sarajevo en 1992, un fort en gueule insouciant et idéaliste. Sympathie pour le diable a l’esthétique crue et rugueuse d’un reportage pris sur le vif, et ménage plusieurs scènes coup-de-poing.
La fille du cratère, de Nadine Beaudet et Danic Champoux
Yolande Simard, épouse du mythique cinéaste Pierre Perrault, est décédée en juin dernier. Comme elle s’était impliquée de longue date au sein des Rendez-vous, il n’était que justice que le festival lui rende hommage en programmant ce documentaire sur elle. Si Yolande Simard était passionnée, sensible et cultivée, alors La fille du cratère est un portrait particulièrement réussi de cette grande dame.